chronique

KAERY ANN
/ Album « Songs of Grace and Ruin »
/ Sortie le 27 Janvier 2023

/L’univers Goth est souvent détourné de sa symbolique originelle, de ses racines médiévales, de ses fondations architecturales et des influences du cinéma expressionniste. La litanie euphonique des artistes contemporains embrasse le monde dans toute son étendue, elle s’interroge sur la suprématie humaine envers la nature, sur les afflictions liées à la mort, à l’amour. La place du sacré est centrale, au coeur même de l’âme et du corps.

Dans l’engourdissante immobilité du quotidien, Kæry Ann fait renaître ce qui semblait être perdu à jamais, la conscience aiguë des sentiments, mots et musique forgés dans le creuset du sensible, absence et présence réunis dans un même corpus. Songs of Grace and Ruin est la métempsycose des éléments qui nous entourent, l’exutoire de souffrances, l’intermédiaire poétique de secrets mis en musique. Et il ne faut pas bien longtemps pour se laisser enivrer par Rust and Love, passage initiatique depuis les vestiges du passé vers le triomphe de l’amour. Le vertige que procure Blue Eyes est intimement lié au titre précédent, d’ailleurs chaque chanson est une progression vers l’horizon d’un désert ou d’une forêt. La forêt est un coffre fort où sont gardés les secrets et la lune veille sur chacun d’eux. Pardonnez moi ces interprétations, mais les 9 compositions de Kæry Ann ont cet aspect topographique et onirique.

L’Italie serait elle devenue le giron du dark folk ? Finito les chansons format radio, la scène indépendante ne se limite pas à un esthétisme caricatural, c’est un Ars Nova dont les protagonistes ont en commun cette passion allégorique, exaltée. Kæry Ann réussit à mener sa barque d’un rivage à l’autre sans un seul titre secondaire, tout y est maîtrisé avec une telle maestria qu’il devient obligatoire d’encenser ce disque, non par pur fétichisme, mais par amour.

Point de redondance, chaque titre se détache et emboîte le précédent, complétant l’oeuvre dans son intégralité. White Cage qui ponctue l’album est un point d’orgue qui appelle nécessairement à la reconduction d’un prochain disque. Oui, Kæry Ann est promise à un bel avenir.

(chronique : Franck irle)

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