reportage

Après une trop longue absence (Covid oblige), le FLOW festival était enfin de retour du 12 au 14 août 2022 sous le soleil radieux d’Helsinki. Autant dire que l’excitation était à son comble, d’ailleurs le festival a affiché complet pendant les trois jours, avec au total 90.000 spectateurs et des files d’attente qui s’étendaient sur plus d’un kilomètre, du jamais vu ! Le temps aussi était exceptionnel – merci le réchauffement climatique – avec des températures frôlant les 30 degrés et un ciel sans nuages, tout au long du week-end. L’Oreille à l’envers était bien sûr sur place pour vous faire partager cette expérience ! (Flow Festival – 12 au 14 Août 2022 – Helsinki – Finlande) (Report par Gwenaëlle Bauvois))

Le premier jour commence en douceur avec la chanteuse auteure compositrice Néo-Zélandaise Aldous Harding, une des artistes dont j’attendais le plus la prestation. Malheureusement, la musique délicate de Harding ne se prêtait guère à une tente de festival. J’aurais tellement aimé pouvoir la voir dans une petite salle sombre, tard le soir. Un rendez-vous manqué avec une artiste dont l’intensité et le talent ne font pourtant aucun doute.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

Virage à 90 degrés avec Burna Boy, le chanteur, auteur-compositeur et producteur nigérien, nommé pour le meilleur album de musique du monde aux Grammy Awards de 2019, trophée qu’il remporte d’ailleurs en 2021. Son melting pot de Dancehall, R’n’B et Afro Beat a le mérite d’être joyeux et dansant, en plus d’être accompagné d’excellents musiciens.

Direction ensuite Jarv Is… le projet lancé par la légende britpop Jarvis Cocker en 2017, l’ancien chanteur de Pulp, groupe que l’on ne présente plus. Je ne savais pas vraiment pas à quoi m’attendre car depuis Pulp, j’avoue n’avoir pas vraiment suivi la carrière de Cocker. Mais agréable surprise, il a encore la classe et son rock pop élégant et dandy marche plutôt bien, même en festival.

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(Flow Festival 2022©photo by Riikka Vaahtera)

Mais le groupe le plus attendu de la soirée était évidemment l’autre légende british, Gorillaz, pour son premier concert en Finlande. Le fameux groupe virtuel a sorti le grand jeu pour FLOW et a offert au public chauffé à blanc un show XXL. Les visuels éblouissants et la succession de hits ont hypnotisé le public pendant près de deux heures. Un groupe pas si virtuel que cela au final car de nombreux invités ont fait des featuring surprises, dont Posdnuos du légendaire groupe De La Soul et le rappeur américain Freddie Gibbs, autre tête d’affiche de FLOW. Même si ce genre de show est évidemment calibré pour les festivals d’été, on sent malgré tout la fougue toute juvénile de Damon Albarn et on ne peut qu’être admiratif face à son foisonnant talent. Un très bon moment qui donne la banane.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

Pour clôturer la soirée, direction le seul lieu de concert fermé du festival, dans une ancienne centrale électrique pour Huoratron Deconstructed, un show (dé)construit spécialement pour FLOW. Huoratron est le projet du musicien finlandais Aku Raski, qui seul dans le noir, assène une techno brutale, sans répit, sous des flashs à donner une crise d’épilepsie. Si je peux apprécier le talent du monsieur, il est temps d’aller se coucher.

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(Flow Festival 2022©photo by Samuli Pentti)

Le samedi commence sous les meilleurs hospices, à la Balloon Stage, cette scène à 360 degrés surplombée d’un ballon géant, avec le concert de Jimi Tenor et UMO Helsinki Jazz Orchestra. Comment définir Jimi Tenor ? Le musicien est une légende de la scène indépendante Finlandaise depuis les années 80. Trompettiste virtuose, Jimi Tenor est surtout un grand touche à tout qui se balade aisément d’un style musical à un autre : jazz, electro, soul… Il était à FLOW accompagné du formidable big band UMO Helsinki Jazz Orchestra que j’ai eu la chance de voir en concert précédemment. Sous un ciel d‘azur, assis autour de cette scène circulaire spectaculaire, il est difficile de bouder son plaisir d’écouter ce jazz de haut vol.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

J’enchaîne toujours à la Balloon Stage avec Kit Sebastian que je ne connaissais pas avant le festival mais qui m’a séduite dès la première écoute. Kit Sebastian est un duo franco-turque installé à Londres qui enchante les oreilles avec un mélange de musique psychédélique, traditionnelle turque et 60’s. Une des meilleures surprises du festival pour sûr !

Un des groupes que j’attendais avec le plus d’impatience est sans nul doute le légendaire Bikini Kill, les rebel girls des années 90 et pionnières du mouvement riot grrrl. Même si la qualité du son laissait à désirer sous la grande tente, leur coolitude absolue, leur énergie et leur bonne humeur ont largement compensé les difficultés techniques. Difficile de bouder son plaisir devant ces nanas de 50 balais jouer du punk et faire des gros doigts au patriarcat, au conservatisme et au jeunisme. “Rebel girl, rebel girl, you are the queen of my world!”.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

Un grand contraste avec la rappeuse américaine Princess Nokia qui, dans un genre différent, affirme elle aussi (en toute petite tenue) sa position de femme forte. Le fait de tenir seule la scène principale en soi force le respect. On continue avec le rap américain avec Freddie Gibbs dont la qualité technique n’est plus à démontrer mais qui manque un peu d’originalité. Demander 50 fois au public de scander ‘Fuck the police’ m’a fait un peu grincer les dents. Gibbs était bien meilleur la veille sur le Clint Eastwood de Gorillaz.

Mais la reine de la journée était sans nul doute Florence + the Machine, pour un de ses seuls concerts européens de l’année. J’avais eu la chance de la voir il y a quelques années et j’avais absolument adoré. Je me suis donc dit que j’allais jeter un œil, sans penser être éblouie de nouveau. Ridiculement présomptueux de ma part car dès que Florence apparaît et commence à chanter, c’est comme une vague qui submerge tout sur son passage. Sa seule présence – belle comme une peinture préraphaélite dans sa somptueuse robe blanche – donne des frissons, et cette voix ! Mais au dessus de tout cela, ce sont ces émotions qui viennent des tripes qu’elle nous communique, cette douleur, cette colère, cette énergie du désespoir. Absolument éblouissante Florence !

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

La soirée se termine avec un de mes groupes préférés du moment, les jeunes irlandais de Fontaines D.C. qui depuis 2019 nous offrent une musique à l’efficacité sans faille. J’avais bon espoir que leur performance soit à la hauteur de mes espérances – ayant déjà visionné des extraits de leurs concerts. Ont-il été à la hauteur ? Nous ont-il donné un concert nerveux, dense, transpirant et impitoyable ? Mille fois oui ! Pour être honnête, la chaleur, la tension et les stroboscopes étaient tellement intenses que j’ai dû sortir de la tente (aussi pour échapper à un certain public plus très frais…) mais cela n’enlève rien à la performance du groupe.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

Fatiguée et la tête un peu lourde, on entame le dernier jour du festival sous un soleil de plomb avec le farfelu et décalé Australien Donny Benét. Ah, Donny, tout un poème ! Inconnu avant Flow, il m’a conquis dès le visionnage de son clip « Konichiwa » (chanson listée par The Weekend comme un de ses sources d’inspiration !) et j’attendais avec plaisir sa performance. Celui qui auparavant chantait des reprises de Tom Jones dans des hôtels nous offre une musique funky, sexy et pleine de dérision : plaisir garanti ! Un concert qui donne vraiment la pêche.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

Programmé à la dernière minute, Black Midi avait attiré tout de suite mon attention. Le groupe londonien, dont le nom est dérivé du genre musical black MIDI (du fait qu’il y a tellement de notes dans chaque morceau que la partition semble presque noire…) propose un intéressant et foisonnant (trop peut-être ?) mélange de noise rock et de post-punk. Leur premier album studio Schlagenheim acclamé par la critique a même été nominé pour le prix Mercury 2019. Malheureusement, la magie n’a pas vraiment opéré live, sûrement à cause de la mauvaise qualité du son. Bien dommage !

Appréciant énormément la musique toute en délicatesse de Michael Kiwanuka, j’étais curieuse de le voir sur scène mais comme j’en avais peur, les nuances du chanteur anglais ne semblent guère adaptées à une grande scène de festival en plein soleil. Frissons malgré tout lors de son interprétation du sublime Cold little heart qui dans ce cadre peu adéquat m’a donné un peu l’impression de donner de la confiture à des cochons.

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(Flow Festival 2022©photo by Konstantin Kondrukhov)

Le FLOW festival s’achève en beauté par le grand Nick Cave. Un mot pour définir sa prestation ? Phénoménal. Le concert commence par Are you ready to love? avec un Nick Cave qui démarre au quart de tour, accompagné par des Bad Seeds au sommet de leur art et des chanteurs de gospel tout vêtus de paillettes apportant une texture nouvelle à la prestation, avec par instant des touches presque à la Elvis (période Las Vegas, of course). Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Nick Cave a écrit Tupelo, chanson qu’il a aussi interprétée, quasiment en transe. Le chanteur nous a également gratifié d’une interprétation au rasoir de There she goes my beautiful one, From her to Eternity et Red Right Hand. Ces moments de rock extatiques furent entrecoupés par des chansons seul au piano – comme I need you – dont Nick Cave a le secret et qui forcent au silence absolu la foule immense. Cave et Ellis ont aussi interprété des morceaux de Carnage, leur premier album studio en duo sorti en 2021, comme le somptueux White Elephant, tout enrobé de chants gospels. J’ai déjà eu la chance de voir Nick Cave deux fois auparavant – au Festival Pori Jazz et lors de sa tournée Conversations with Nick Cave où le chanteur jouait seul et répondait aux questions du public – mais l’émotion de le voir sur scène reste absolument intacte et pure. La façon dont le chanteur de 63 ans se tord, saute, hurle et agrippe son public relève presque de la possession par instants. L’énergie brute et viscérale que Cave dégage reste absolument électrisante. Une expérience inoubliable.

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(Flow Festival 2022©photo by Riikka Vaahtera)

L’édition 2022 du FLOW festival a tenu toutes ses promesses et valait la peine d’affronter la chaleur et la foule (et peut-être les virus…). On en prend plein les oreilles et plein les yeux, et on ressort KO, perclus mais heureux, d’autant plus après cette prestation finale à couper le souffle. FLOW a déjà annoncé ses dates pour 2023, du 11 au 13 août, et l’on sera de nouveau au rendez-vous ! A l’année prochaine, FLOW !

(Article par Gwénaëlle Bauvois)

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(Flow Festival 2022©photo by Jussi Hellsten)

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