chronique

TÖT
/ Album « No Venimus En Paz »
/ Sortie le 28 Janvier 2023

/Quand on évoque l’EBM, on se heurte souvent à une mauvaise interprétation du genre. On en oublie les ramifications proches à l’origine de la musique industrielle et surtout le champ des expérimentations permettant de faire une distinction entre électro et punk.

Chez Töt, le minimalisme est anachronique, il dépasse le cadre d’une description à l’emporte-pièce. Les influences ( Kalt, Frontmaschine…) dont son auteur revendique l’héritage, vont beaucoup plus loin. Derrière cette apparente froideur, se cache une sensibilité aiguë, échelonnée sur 12 titres. Des titres infectieux chassant les fantômes du passé, des amis partis trop vite, Töt nous prend à témoin, encalminé par le calvaire de l’existence.

« Deceiver » culmine dès le début par ses ripostes rythmiques, une décharge sonore dont le refrain exprime une colère Homérique, celle d’un monde où coexistent divisions et filiations de la pensée. « L’impasse » rentre dans le vif du sujet, revendicatif « nous en savons plus que vous ne pouvez l’imaginer, on vous voit jamais à l’église et vous avez bien mal voté ». Le monde est un paradoxe que Töt met en lumière avec une lucidité effroyable, sans jamais abuser de clichés engagés. « Mon Nom est Personne » illustre la désincarnation de l’individu, contre-pied aux thématiques formelles magnifiées par une rage vocale d’une densité incommensurable.

C’est en perdant magnifique que Töt nous relie avec le réel, ce désespoir nous pousse à triompher de notre aveuglement, des chaînes invisibles qui nous relient jusqu’à nous transformer en esclaves dociles et apeurés. Le miroir dans lequel Töt nous invite à plonger n’est pas une vision narcissique, elle dépasse l’individualité pour se soustraire à l’hédonisme qui sévit depuis des décennies. Oui, l’album ne se limite pas à une musique dansante, il est l’exploration de notre perte d’humanité. Et rien que pour cela, « No Venimus En Paz » annonce clairement ses intentions. Celles de ne pas se résigner. Un disque d’une totale véracité.

(chronique : Franck irle)

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