chronique

THE SIRENS OF TITAN
/ Album « Age of Treason »
/ Sortie le 23 Août 2023

/Ce que la beauté génère au premier regard, de ses contours et de ses formes, flotte à la surface de la rétine dès que l’on ferme les yeux. Mais dès que l’on s’attarde sur l’oeuvre de Wolfe von Lenkiewicz choisie pour représenter la musique de The Sirens Of Titan, l’évidence saute aux oreilles avec « Dark Heart Beating« . Une étrange sensation recouvre la porosité de deux mondes que tout sépare. L’acoustique se glisse dans un flux sinueux, le chant se fraye un chemin pour atteindre le centre névralgique, provoquant une synesthésie. La magie agit dès la 31ème seconde avec ces mots « And you ladies on your own, i guess his answer is made of stone, and the horses that you’ve known, they’re not running anymore » scellant définitivement tout élan. La marque de la trahison est profonde, une entaille que chacun de nous porte et essaie vainement de cacher.

Nous sommes entrés dans un âge où les conflits intérieurs se sont emparés des canaux de communication, pauvres turlupins repliés sur nous-mêmes, obsédés par la primauté de notre existence qui prévaut sur celles des autres. Le titre suivant, « Age of Treason« , n’a jamais autant été en adéquation avec la pochette de l’album. Miroir aux alouettes, nous sommes pris à notre propre jeu, seule apparaît cette souffrance qui n’épargne personne. John-Paul Pryor secondé par Jez Leather n’est pas novice dans l’art de l’écriture, entourés de trois musiciens, le duo qui n’en est plus un, déploie son spleen, comme la rencontre d’une musique folk avec la fée électrique. « Glass Scorpion » donne le vertige, une piqûre qui anesthésie le corps mais libère l’âme. Malgré les mélodies foisonnantes, les harmonies vocales angéliques, la thématique est d’une tristesse à pleurer, « Bunny » en devient même californien par la steel guitar ( I don’t believe in America) tout en étant son contraire.

La mélancolie est la palette de toutes les couleurs assimilables aux sentiments, elle est l’antidote à la mort, elle nous éclaire tout en nous enténébrant. Chaque composition avance ses pions, et cette voix, d’une pureté maladive, enfonce encore le clou, la souffrance devient un exutoire (mention spéciale pour le moment de grâce « Bury me in black sand« ). De facture presque classique, dans sa structure, l’album peut aisément être considéré comme un magnum opus. On s’accroche à chaque accord, chaque mot, tout est ici livré dans sa plus humble expression.

The Sirens Of Titan mérite d’être considéré à ce titre comme le disque compagnon de cette saison, et bien au delà, un album du quotidien.

(chronique : Franck irle)

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