reportage – Viagra Boys, Zénith de Paris 25/04/2025

Les températures montent avec le printemps mais sont encore loin d’atteindre la fournaise que déclenche la prestation qui a lieu ce vendredi soir au Zénith de Paris. Une soirée où le post-punk suédois s’impose comme référence en la matière, porté par un Sebastian Murphy au sommet de son art. Amateurs d’alcool, de tatouages et de gros son fracassant, bienvenus au concert de Viagra Boys.

Cette soirée au Zénith de Paris prend des allures de célébrations : la première en l’honneur du retour en France de Viagra Boys, groupe de post-punk suédois emblématique qui depuis 2018 et son premier album Street Worms s’est érigé comme fer de lance de ce style, en amont de la vague dublinoise qui aujourd’hui remplie des stades. Sebastian Murphy ne s’est pas transformé en idole des foules mais continue avec ses camarades à nous proposer des disques détonnant, à l’humour acide et à contre-emploi de tout ce que le courant mainstream peut proposer.

La seconde occasion est la sortie ce vendredi même du quatrième album studio de Viagra Boys intitulé viagr aboys. Un patronyme pas très recherché et cela nous importe peu tant le groupe dispose d’un tel potentiel que n’importe quel borborygme ferait l’affaire. À la suite d’une excellente prestation à Rock en Seine au domaine de St Cloud en 2023, en plein cagnard afin de rajouter quelques degrés à l’atmosphère volcanique que déclenche les garçons une fois sur scène, Viagra Boys reviennent donc avec cette toute première date de leur tournée européenne, qui va les mener jusqu’au bout de l’été dans les plus grandes cités de notre continent jusqu’aux nombreux festivals estivaux (avec une petite visite aux Vieilles Charrues le 18 juillet). Tout cela pour se mettre en chauffe avant le gros du programme, soit un automne et un hiver américains avant de clôturer ce marathon à la maison, dans l’immense Avicii Arena de Stockholm, et cerise sur le kanelbullar, avoir les honneurs de l’Alexandra Palace à Londres en mars 2026.

C’est donc presque en toute intimité que nous assistons à ce concert au Zénith qui vient baptiser les nouveaux titres de l’album. Et quelle n’est pas la surprise pour le groupe que d’entendre à peine 12h après l’apparition du disque sur les plateformes de streaming le public reprendre déjà en chœur certains de ses refrains. Pour ce qui est de l’atmosphère, cette dernière est à la hauteur des attentes de Viagra Boys, et ce malgré une salle loin d’afficher complète. Tous les efforts seront donc concentrés dans la fosse, où les connaisseurs savent qu’elle est indispensable pour vivre un concert des Suédois de la façon la plus optimale. Et ces derniers ne se font donc pas prier dès les premières notes de Man Made Of Meat, excellent premier single de viagr aboys, qui nous évoque un petit air à la The Hives, ce qui peut probablement être fait en toute connaissance de cause, les Suédois s’amusant à entretenir une fausse gueguerre contre leurs compatriotes à coup de posts et de commentaires dézinguant sur les réseaux sociaux. Quelle que soit la raison de cette inspiration, le single est encore plus addictif joué en live et c’est ainsi parti pour une heure trente de tubes punks complètement déjantés, toujours rehaussés par le saxo sexy d’Oscar Carls, ainsi que les claviers de Elias Jungqvist, nos deux amis rois du mini short en jeans et des danses suggestives entre deux solos. C’est cette ambiance mi punk mi dancing que l’on adore chez Viagra Boys, qui évidement ne serait rien sans le charisme déroutant de leur leader Sebastian Murphy.

Fidèle à lui-même, cet américain suédois d’adoption demeure l’emblème de Viagra Boys : torse nu avec tatouages et bide à bière, bas de survêtement Adidas et lunettes noires en toutes circonstances, sa gouaille continue de nous faire autant rire que de nous hypnotiser, ce dernier réussissant à nous entrainer dans sa propre folie, se rendant inexplicablement sexy lui-même. Les titres défilent sous des spotlights vifs et des nuages de fumées blanches (et pourtant, le Pape n’est toujours pas élu), on nous accorde cependant quelques interludes salutaires entre deux crises de hurlement quand Sebastian prend un peu de temps pour nous remercier de notre fidélité, de fustiger les dirigeants de son pays natal et de porter un toast à la sortie de leur nouvel album avec une bonne bouteille de Żubrówka bison, un excellent choix qui réussit à démultiplier les forces de Murphy, qui ne cesse ses aller et retours tout du long de la scène, entre deux roulades et autres séances de pompes, mettant toujours en avant son « élégante » silhouette de squatteur de canapé face à une série Netflix ou à un match de foot.

Les nouveaux titres passent extrêmement bien en live, continueront probablement d’évoluer durant la tournée XXL qui les attendent, et assister à la naissance des futurs classiques du groupe est un sacré privilège pour le public parisien qui n’aura pas démérité ce soir malgré l’effectif réduit, faisant oublier les gradins bâchés et concentrant toute son énergie sur la scène, avec son lot de projectiles en tout genre et de crowd-surfing du plus bel effet. En vrac, on dépensera ainsi les quelques gouttes de carburant qu’il nous reste sur les tubes que sont Punk Rock Loser, Down In The Basement, Sports, avant d’atterrir avec un peu de fracas sur Terre pour le titre de clôture Worms, un des rares qui nous permet d’attester de la très belle voix de Murphy, qui sait prendre des tessitures de baryton quand il ne braille pas. Un peu de douceur après un concert coup de poing, qui ne nous a pas laissé une minute de répit (nous aurions bien partager la vodka bison pour nous hydrater également, mais notre déontologie nous oblige à inciter à la modération) et ce pour notre plus grand plaisir. Viagra Boys est un immanquable en 2025, et ce nouvel album qui renoue avec l’aspect brut de décoffrage des tous débuts ne fera qu’entériner ce statut.

Setlist :
Man Made of Meat
Slow Learner
Waterboy
Punk Rock Loser
Dirty Boyz
Uno II
Ain’t No Thief
Pyramid of Health
Troglodyte
Ain’t Nice
Best in Show pt. IV
Store Policy
Down in the Basement
Medicine for Horses
Sports
Research Chemicals
Bog Body Intro
The Bog Body
Worms